lundi 14 mai 2012

Israël et Azerbaïdjan : une nouvelle alliance contre l’Iran


Carte présentant Israël en vert et l'Azerbaïdjan en orange
Israël en vert et l'Azerbaïdjan en orange

Au Moyen-Orient la crise iranienne évolue :
- Le 6 mai 2012, a eu lieu le second tour des élections législatives en Iran, la majorité des élus soutient le guide Ali Khamenei. Mais ces résultats ne permettent pas de discerner le rapport de force entre partisans et opposants au président Ahmadinejad.
- Courant avril 2012, les États-Unis ont déployés des chasseurs furtifs F-22 sur la base d’al-Dhafra, aux Émirats arabes unis.
- En Israël, le parti de centre droit Kadima est entré, début mai, dans le gouvernement de Benjamin Netanyahou.
Ce gouvernement d'union nationale met fin, avant même qu'elle est commencée, à la campagne pour les élections législatives qui auront donc lieu à l'automne 2013. Cela laisse donc à Benjamin Netanyahou tout loisir de s'occuper de la crise iranienne. Dans ce cadre, l’État hébreu renforce ces partenariats stratégiques en préparation d’une éventuelle intervention militaire en Iran. C’est le cas en particulier avec l’Azerbaïdjan.


Rappel historique
La République d'Azerbaïdjan est un pays du Caucase situé sur la ligne de division entre l'Europe et l'Asie. Sa capitale est Bakou, le pays est sorti de l'Union des républiques socialistes soviétiques en 1991. La majorité de sa population est à majorité musulmane (85 % de chiites). Le pays est richement doté en hydrocarbures, mais sans réelle aura géopolitique.

Les relations entre Israël et l’Azerbaïdjan commencent à l’indépendance du pays de l’URSS. Le 25 décembre 1991, Israël est l’un des premiers pays à reconnaître l’indépendance de la République d'Azerbaïdjan. Le 7 avril 1992, les deux pays établissent des relations diplomatiques.
En août 1997, la visite à Bakou du Premier ministre israélien de l’époque Benjamin Netanyahou relance les relations entre les deux pays. Depuis lors, Israël et a resserré ces liens avec l'Azerbaïdjan. L’armée israélienne aurait aidé l’armée azérie à se moderniser.
En 2009, le président azéri Ilham Aliyev rencontre son homologue israélien Shimon Peres. Cette même année un mémo diplomatique américain rendu public par Wikileaks, révèle que le président azéri aurait comparé les relations de son pays avec l’État hébreu étaient « comme un iceberg, neuf dixièmes se situent sous la surface ».
En 2010, Ilham Aliyev a publié un décret rendant obligatoire pour tous les étrangers voulant visiter le pays de se faire délivrer un visa dans les consulats et non plus dans les aéroports comme précédemment. Les citoyens turcs et israéliens sont les seuls ne pas être concernés par cette mesure.

Contexte géopolitique
Depuis 2.500 ans vivent en Azerbaïdjan les Juifs des montagnes. Il s’agit d’une population juive se réclamant descendant des Juifs exilés à Babylone après la chute du Temple de Jérusalem 586 avant l’ère courante. De 1970 à 1990, la majorité des Juifs des montagnes émigra principalement en Israël. Aujourd’hui, il y a environ 12.000 Juifs des montagnes qui vivent en Azerbaïdjan principalement à Bakou.

Mais le pays est avant tout un pays chiite (93,4 % de la population est musulmane, dont environ 85 % de chiites et 15 % de sunnites) et face à l'Iran qui cherche à rassembler le monde chiite autour de lui, l'ancienne république soviétique est frondeuse. En effet, l'Azerbaïdjan est un État laïc à régime politique fort (les dernières élections présidentielles de 2003 n'ont pas été jugées démocratique par l'OSCE) et ces gouvernants voient d'un mauvais œil la volonté de l'Iran d'exporter la révolution islamique dans le pays.

En février 2012, Bakou a conclu avec Israël un contrat d’armement d’une valeur de 1,6 milliard de dollars pour la fourniture de drones et de systèmes antimissiles. Dans le même temps les relations avec Téhéran se sont dégradées. L’Iran a accusé l’Azerbaïdjan d’avoir soutenu des équipes d’assassinats ciblés formées par Israël et visant les scientifiques du programme nucléaire iranien.
Bakou de son coté a annoncé, en mars, avoir arrêté 22 individus pour espionnage pour le compte de l’Iran. Ils auraient été chargé par les Gardiens de la Révolution Iranienne de « commettre des actes terroristes contre les ambassades des États-Unis, d’Israël et d’autres États occidentaux ».
Mais ce rapprochement avec Bakou est stratégique pour Jérusalem, l’Azerbaïdjan a en effet 611 kilomètres de frontière avec l’Iran et possède une base aérienne à seulement 550 kilomètres de la frontière iranienne.

Enjeux géostratégiques
Le principal problème d’une attaque aérienne israélienne sur l’Iran est la distance entre les deux pays. En effet, plus la distance est grande plus les appareils doivent emporter de carburant et ce au détriment des munitions. L’accès de l’aviation israélienne à une base aérienne en Azerbaïdjan permettrait aux chasseurs-bombardiers israéliens F-15I et F-16I de ne pas avoir à faire le trajet retour vers Israël mais simplement de se poser en Azerbaïdjan après des frappes contre les infrastructures nucléaires iraniennes. Emporter moins de carburant signifie pouvoir emporter plus de bombes et donc de frapper plus efficacement.
Or, l’Azerbaïdjan dispose d’un aérodrome à Sitalcay à 550 kilomètres de la frontière iranienne et 70 km de Bakou.

Il reste peu probable que la base serve de « porte-avions » à Israël puisque le ministre de la défense azerbaïdjanais, Safar Abiyev, a déclaré le 13 mars 2012 lors d’une visite à Téhéran : « Nous n'autoriserons personne à utiliser notre sol et notre espace aérien contre la République islamique d'Iran, dans la mesure où nous considérons l'Iran comme un ami et un frère. »
Néanmoins, un officier du renseignement américain envisage que Tsahal y installe des hélicoptères qui pourraient mener des missions de recherche et d’assistance de pilote éventuellement perdu en territoire iranien.
Il est également possible que l’Azerbaïdjan serve de base pour les drones israéliens pour la reconnaissance avant une attaque ou pour l’observation de résultat de celle-ci.


Les relations entre Israël et l’Azerbaïdjan sont anciennes. Elles ont connu une nouvelle période faste lorsque Tel-Aviv s’est brouillé de son allié turc en 2010. La montée en puissance dans les relations internationales de Téhéran contrarie Bakou. Israël profite donc de la situation pour mettre la pression sur l’Iran. Et ce d’autant plus que débarrassé des contraintes électorales et fort d’un gouvernement d’union nationale Benjamin Netanyahou peut négocier en position de force avec les États-Unis où la campagne présidentielle va commencer.

Sources :
- Wikipédia, lencyclopédie libre
- The World Factbook, CIA
- Jacques Benillouche – « Israël se dote d'un gouvernement d'union nationale » – Slate.fr – 8 mai 2012 http://www.slate.fr/story/54703/israel-gouvernement-union-nationale-netanyahou
- Aymeric Janier – « Israël-Azerbaïdjan : le nouveau front anti-iranien ? » – LeMonde.fr – 5 avril 2012 http://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2012/04/05/israel-azerbaidjan-le-nouveau-front-anti-iranien_1679972_3218.html
- Mark Perry – « L'Azerbaïdjan, le terrain d’atterrissage secret d’Israël » – Slate.fr – 30 mars 2012 http://www.slate.fr/story/52415/israel-iran-azerbaidjan-guerre


Par AD

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